Par Devesh Dukhira
Les conditions du marché du sucre sont actuellement favorables. Les prix sont soutenus par une hausse générale de prix des commodités agricoles à l’échelle mondiale et, en Europe en particulier, par une production moindre du sucre de betterave en 2022 et aussi par une hausse importante de leurs coûts de production, surtout après la flambée du coût d’énergie l’an dernier suivant la guerre en Ukraine.
De ce fait, le prix moyen (base FOB Port Louis) obtenu par le Mauritius Sugar Syndicate sur son sucre blanc pour la campagne en cours a augmenté de presque 80% comparé à la récolte 2021 (USD 750 contre USD 372), alors que pour les sucres spéciaux, qui sont déjà à des niveaux de prix plus élevés, la hausse moyenne a été de 25%. Ces hausses ont pour résultat un prix ex-Syndicat de Rs 21 500 (estimation actuelle) qui sera payé aux producteurs, soit une hausse d’environ 30% la tonne de sucre sur l’année précédente.
Il faut néanmoins souligner que le coût de production à Maurice a également augmenté substantiellement sur les deux dernières années, notamment les fertilisants, le coût d’énergie, les taux de fret maritime, le transport local.
Un fait intéressant à faire ressortir est la hausse de vente de nos sucres spéciaux à haute valeur ajoutée, qui rapporte davantage au secteur. En 2022, la vente a augmenté de 20%, surtout soutenue par le marché de l’Union européenne (+45%) – elle a atteint 138 000 tonnes (soit presque 60% de la récolte sucrière en 2022). Ces sucres sont vendus dans des segments niches dans une cinquantaine de pays, et sont donc moins exposés à la volatilité des cours mondiaux. Maurice demeure un leader de marché dans nombre de ces destinations.
La baisse continue de la production cannière à Maurice inquiète.
Nous estimons que la vente pour la prochaine campagne, soit pour la récolte 2023, serait sous des conditions de marché semblables, surtout que nous ne nous attendons pas à une grande amélioration de la production sucrière, que ce soit en Europe ou à l’échelle mondiale.
La baisse continue de la production cannière à Maurice inquiète, entraînée surtout par la baisse de superficie. Selon les chiffres de la Chambre d’Agriculture, elle serait déjà descendue en 2022 en-dessous de 40 000 hectares, soit 35% inférieur à la surface cultivée à la fin du Protocole Sucre ou presque la moitié de la surface cultivée en début de ce siècle. Le coût de production à la tonne augmente donc davantage alors que la flexibilité que nous avons pour diversifier le marché davantage à la recherche de plus de valeur est remise en question.
Il est donc primordial de prendre des mesures urgentes au niveau du gouvernement pour arrêter cette hémorragie. Au cas contraire, nous risquons de mettre en péril l’avenir de ce secteur, non seulement pour la production sucrière mais aussi ses co-produits, dont la bagasse qui reste une source d’énergie renouvelable importante, et la mélasse pour la production d’éthanol, sans mentionner les risques pour l’environnement et la sécurité alimentaire et énergétique pour le pays.
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